POLITIQUE - “Agnès Buzyn est en train de tuer l’hôpital public.” La colère gronde dans le secteur hospitalier français. Débuté dans les établissements parisiens à la mi-mars le mouvement de grève touche à présent 65 services en France selon le collectif Inter-Urgences. Et les récents propos de la ministre de la Santé, repris notamment par un député de la majorité ne risquent pas de calmer la situation alors qu’un front syndical majoritaire constitué par la CGT, FO et SUD appelle à une journée d’action nationale ce jeudi 6 mai.
Invitée de France inter deux jours plus tôt, Agnès Buzyn avait en effet culpabilisé l’équipe de nuit des urgences de l’hôpital Lariboisière à Paris qui s’était mise en arrêt maladie et ne s’était pas présentée dans la nuit du lundi 3 au mardi 4 mai. Pointant un “dévoiement”, elle estime que cette modalité “entraîne une surcharge de travail pour les autres”
“Nous l’avons vu à Lons-le-Saunier, ce sont les ambulanciers, ce sont les pompiers, ce sont les médecins libéraux qui ont pris en charge tous les patients. En faisant cela on accroît la fatigue des autres (...) ce n’est pas bien”, avait-elle critiqué, comme vous pouvez le voir ci-dessous.
Des propos repris peu ou prou par le député Thomas Mesnier, médecin urgentiste et élu LREM de Charente. “Le droit de grève est fondamental mais utiliser l’arrêt maladie de façon détournée est inacceptable. Les soins doivent être assurés pour ne pas mettre en difficulté les patients”, a-t-il plaidé ce mercredi 5 juin sur RTL.
“Nous sommes dans un état de chaos”
Autant de critiques qui attisent la colère des soignants mobilisés pour l’arrêt des fermetures de lits, une hausse des rémunérations de 300 euros net et une augmentation des effectifs.
Contacté par franceinfo, le professeur émérite au CHU de la Pitié-Salpêtrière à Paris André Grimaldi estime que l’intervention radio dans laquelle Agnès Buzyn culpabilise ses collègues de l’hôpital Lariboisière était “catastrophique.” “Au lieu de les recevoir immédiatement, la ministre dit ‘Je suis des vôtres, je vous comprends, mais soyez stoïques’”, regrette-t-il avant de trancher: “il y a une urgence absolue. Nous sommes dans un état de chaos”.
Même exaspération du côté du porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France. Pour Christophe Prudhomme, “les propos tenus par Madame Buzyn sont proprement scandaleux.” Il pointe la responsabilité personnelle de la ministre dans la situation actuelle et estime que c’est elle et la politique du gouvernement qui mettent les patients en danger. “Madame Buzyn est aujourd’hui en train de tuer l’hôpital public. Son rôle, en tant que ministre, est d’assurer la sécurité des patients en permettant aux professionnels de santé de travailler en sécurité, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui”, estime-t-il sur Europe1.
Après plus de deux mois de grève, un nouveau palier a été franchi en ce début de mois avec une recrudescence d’arrêts maladie chez les soignants. Agnès Buzyn n’a pas encore confirmé sa venue au congrès des urgentistes qui se tiendra en même temps que la manifestation parisienne. Sibeth Ndiaye, la porte-parole du gouvernement les a toutefois assurés sur RTL de “toute la solidarité des ministres”, disant “comprendre aujourd’hui ce qu’est leur colère, parfois leur désespoir”.
À voir également sur Le HuffPost: