POLITIQUE - "Je t'aime, moi non plus", voici comment pourrait être résumée la relation tumultueuse entre les présidents et les sites industriels français. Qu'elles soient délocalisées ou tout bonnement fermées, les usines sont devenues ces dernières années les symboles de promesses non tenues, comme le montre la vidéo en tête d'article. Un phénomène qui pourrait également toucher le quinquennat d'Emmanuel Macron alors que le dossier de l'aciérie Ascoval patine.
Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire s'est rendu ce jeudi 8 novembre sur le site Ascoval de Saint-Saulve (Nord). Un déplacement en terrain miné alors que cette aciérie est placée en redressement judiciaire. Les quelque 281 salariés sont suspendus à la décision du tribunal de grande instance de Strasbourg. Ce dernier doit se prononcer le 12 décembre prochain sur le projet de reprise déposé par le groupe franco-belge Altifort.
"L'État n'est pas là pour sauver un canard boiteux, il est là pour défendre une aciérie qui est performante, qui fait des aciers de qualité, avec un outil de production qui sera plus respectueux de l'environnement que d'autres", a insisté le ministre, affirmant que sa détermination à sauver l'usine était "totale". Quelques heures après, Emmanuel Macron, invité de France 3, a assuré vouloir "sauver" l'aciérie. "On se bat pour avoir une solution. Je le dis aux salariés et à leurs familles: on fera tout pour qu'Ascoval soit sauvée".
Florange, symbole d'une parole pas toujours respectée
Le discours de Bruno Le Maire n'est pas sans rappeler celui des précédents gouvernements en matière de lutte contre la fermeture de sites industriels. Ce ne sont pas les anciens salariés des hauts fourneaux de Moselle, propriété d'Arcelor Mittal, qui diront le contraire. Les promesses tenues par Nicolas Sarkozy pour sauver l'usine de Hayange en 2008 n'ont pas permis d'empêcher la fermeture du site un an plus tard. Scénario identique observé à quelques kilomètres de là. Sur la commune de Florange, les deux derniers hauts fourneaux de Moselle ont rendu leur dernier souffle en avril 2013, malgré les engagements réitérés par François Hollande de lutter contre la désindustrialisation.
Au-delà de la dimension symbolique de ces fermetures, Florange a également fragilisé la parole du gouvernement. Le dossier Arcelor Mittal ayant largement affecté les relations entre Arnaud Montebourg et Jean-Marc Ayrault, en désaccord sur la stratégie à adopter. Le ministre du Redressement productif avait à l'époque défendu la ligne d'une nationalisation temporaire et partielle du site, contre l'avis du Premier ministre. "La quasi-totalité des ministres de messieurs Chirac et Sarkozy avait approuvé mon projet, analysait Arnaud Montebourg en octobre 2016, en marge d'une rencontre avec les syndicats d'Arcelor Mittal (...) Nous avions les investisseurs, nous avions les industriels qui étaient prêts à reprendre derrière la nationalisation. Je me rappelle que la majorité parlementaire me soutenait. Bref, deux personnes ont fait un choix différent (le président et le Premier ministre, ndlr)." Deux ans après la fermeture du site, le gouvernement a fait voter la "loi Florange", visant à contraindre les industriels à chercher un repreneur en cas de fermeture d'usine. Sur l'ensemble des Hauts-de-France, selon les chiffres de l'Urssaf, près de 70 000 emplois ont été perdus dans l'industrie ces dix dernières années.
Face à la désindustrialisation galopante, les fermetures d'usines sont monnaie courante. En tout, 1928 usines ont fermé entre 2009 et 2017. Toutefois, au pied du mur, certaines industries s'en sortent mieux que d'autres. Le sauvetage de l'usine de lingerie Lejaby installée à Yssingeaux en Haute-Loire en est l'illustration. En 2012, 93 emplois de cette usine ont tous été sauvegardés grâce à la reprise d'un sous-traitant du maroquinier LVMH.
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