LGBTQI - À l'issue de l'émission "Destination Eurovision", qui s'est tenue sur France 2, ce samedi 12 janvier, quatre candidats ont été qualifiés pour participer à la dernière manche, la finale du 26 janvier, dans le but de représenter la France lors de l'Eurovision 2019. Parmi eux, le jeune favori des réseaux sociaux Bilal Hassani.
À seulement 19 ans, le YouTubeur est venu sur scène interpréter son nouveau morceau "Roi". Une chanson et une performance qui ont de toute évidence conquis le public et les téléspectateurs, si l'on en croit ses résultats. Avec 115 points en tout, il s'est largement imposé devant Chimène Badi, Silvàn Areg et Aysat, les trois autres finalistes.
Invité au titre d'expert, André Manoukian, l'ancien juré du télé-crochet "Nouvelle Star", est, lui aussi, tombé sous le charme du jeune musicien à la perruque blonde et au style androgyne. Il a tenu à le féliciter. "Lui, il invente le chanteur inclusif, concède le jazzman. C'est-à-dire qu'il est porteur des deux sexes et c'est fabuleux."
Il poursuit dans sa lancée: "Je voulais juste te dire un truc. Dans l'antiquité, les personnages hermaphrodites étaient des divinités. Et c'est ça que tu portes. [...] Je suis un roi car je suis porteur de la beauté des deux sexes, réconciliés à l'intérieur de moi-même." Un "hommage" auquel lui a timidement répondu le principal concerné en le remerciant mais qui a soulevé quelques critiques sur les réseaux sociaux.
Ce qui pose problème, ici, ce n'est pas la démarche d'André Manoukian. Comme beaucoup de personnes il a visiblement été touché par la prestation de Bilal Hassani. Mais, si le jeune homme aime porter des perruques et se maquiller, cela ne fait pas de lui une personne hermaphrodite, ni intersexe.
Qu'est-ce que l'intersexualité?
Environ un bébé sur 2000 naît intersexe. Mais qu'est-ce que l'intersexualité? Interrogée par Le HuffPost américain, Elizabeth Reiz, professeure en études de genre, estime qu'il s'agit d'une personne née avec une anatomie sexuelle atypique. À la naissance, certains naissent avec un sexe que les médecins qualifient d'ambigu, au sens biologique du terme. Cela veut dire qu'il est difficile à définir.
"Leurs appareils génitaux peuvent avoir l'air différent, ou pas - parfois ils ressemblent à ceux de n'importe quel garçon ou fille. Ils peuvent ne pas découvrir qu'ils sont intersexes avant la puberté parce que c'est leur anatomie reproductive interne qui est atypique", détaille la spécialiste avant d'ajouter qu'il existe de nombreuses formes d'intersexualité, chaque personne intersexe pouvant avoir des caractéristiques différentes.
Toujours est-il que Bilal Hassani ne revendique en rien être une personne intersexe. Ce dernier a toujours exprimé être un homme et se sentir homme. "J'ai une forte part de féminité en moi mais je reste un garçon", comme il l'expliquait encore dans cette vidéo publiée en décembre 2018.
Est-il pour autant hermaphrodite? Non plus. Une personne naît hermaphrodite quand elle arrive au monde avec les attributs des deux sexes, un pénis et un vagin. Une condition physique sur laquelle Bilal Hassani ne s'est, jusqu'à preuve du contraire et pour le moment, jamais confié.
Beaucoup de confusions
André Manoukian n'est pas le seul à confondre les notions d'intersexualité et d'hermaphrodisme. Beaucoup de questions et de confusions persistent à l'heure actuelle. Les personnes intersexes peuvent aussi être confondues avec les personnes trans, qui ne se sentent pas en accord avec leur genre assigné à la naissance.
"Nous, on veut juste qu'on laisse nos corps tranquilles. On ne touche à rien tant que la personne n'est pas en capacité de s'autodéterminer", a expliqué à L'ObsVincent Guillot, le fondateur de l'Organisation internationale des intersexes. À la naissance, bien souvent les médecins décident plus ou moins du genre du nourrisson. Cette décision passe par une opération chirurgicale que l'enfant n'a, évidemment, pas décidée.
Ces opérations sont vécues par beaucoup de personnes intersexes comme des mutilations. Bien des années plus tard, nombre de personnes ayant subi ce genre d'opération à la naissance expliquent souffrir de troubles psychologiques. Elles ont aussi valu à la France, en 2016, des condamnations de la part de l'ONU.
Alors que l'Allemagne a adopté, au mois d'août dernier, un texte légalisant l'existence du genre intersexe sur les certificats de naissance, d'autres pays en Europe, comme l'Autriche ou les Pays-Bas, se sont lancés dans cette même voie. En France, François Hollande, encore président, déclarait, en 2017, vouloir mener un combat contre les "opérations chirurgicales subies par des enfants intersexes".
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